OUVERTURE
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OUVERTURE
Les limites de l’âme tu ne
peux pas les atteindre, n’importe quel chemin que tu suives,
tellement
profonde est sa raison (son logos).
Héraclite.
u
Et
tandis que, inquiets, angoissés pour notre argent, nous
nous informons
sur les fluctuations des Bourses, les décisions des
gouvernements pour
gérer la situation, le prix des carburants, les retombées
des crises
des marchés des capitaux, les analyses et les prospections des
économistes, les
déficits budgétaires, les stock options, les crédits à
risque, le
CAC 40, les économies réelles, les taux d’intérêt, les fonds
propres, les
hedge funds, les mouvements des places financières, les subprimes
et autres
pouvoirs d’achat, la technoscience imperturbable,
insouciante, souveraine,
indifférente à nos soucis, réduit nos âmes à des
entités numérisables,
à des mécanismes prévisibles et programmables.
u
Nous
ne faisons pas de dossiers. Nous avançons à reculons. Si
nous revenons
à Pierre Jean Jouve (1887-1976), ce n’est pas pour
ajouter encore
quelques pages de commentaires dans le corpus d’écrits,
déjà riche,
sur l’auteur de Inconscient, spiritualité
et catastrophe. C’est parce que
plusieurs poètes et romanciers d’aujourd’hui en sentent le
besoin. Le
besoin : apprendre auprès d’un maître en la matière à aller le plus
loin possible
dans les énigmes de l’âme humaine.
u
Infinis
remerciements à Philippe Raymond-Thimonga, concepteur et
réalisateur de cet hommage à Jouve. Il s’agit d’un projet qui
courait depuis
une dizaine d’années. Paulina 1880,
le poète Jouve, ses rapports à
la psychanalyse ont souvent peuplé nos discussions arrosées et
enfumées. Dix
ans. C’est apparemment le temps d’essai qu’il faut afin
d’être sûr
que l’appel à un écrivain « du passé » est une nécessité profonde
et pas
un effet de l’industrie culturelle.
u
Quand
Marek Bie´nczyk nous envoyait sa chronique sur la Pologne qui
danse, il ne pouvait pas savoir qu’il y aurait dans le
même numéro
un article de Lambros Kampéridis sur Yeats, intitulé « The
Dancer
and the Dance ». Le hasard, certes. Mais, parfois, comme dans
ce cas-ci, le hasard en dit plus sur l’état de notre monde que
mille études
savantes.
u
En
ces temps de banqueroute psychique du monde dit
occidental, Pierre
Jean Jouve est plus actuel que jamais.
u
Le
kitsch étant, selon la fameuse définition de Kundera,
l’accord catégorique
avec l’être, l’art contemporain ,
l’art
qui affiche fièrement son attachement
inconditionnel aux valeurs du temps présent, ne peut être que
du kitsch. Et si tout cela sonne encore trop abstrait, vous n’avez
qu’à suivre
Mehdi Clément dans ses pérégrinations londoniennes.
u
Sont
aussi actuels, à l’instar de Pierre Jean Jouve, Henry
James (Belinda
Cannone), Alban Nikolai Herbst et Éilís Ní Dhuibhne
ci-présents, Richard
Millet (François Taillandier) et, en premier lieu, le
naturaliste explorateur
Pehr Kalm (André Major). À ne pas confondre avec ceux qui font
l’actualité :
François Bégaudeau (Emmanuel Dubois de Prisque)
ou Marie Darrieussecq (Nunzio Casalaspro).
u
Le
rire de Kundera a ébranlé l’homo
sovieticus bien plus que les actions
concertées des dissidents, du pape et de Reagan. Ce n’est
pas moi
qui le dis. C’est l’Histoire. Oui, l’Histoire ! Cela a existé. Or,
la rapidité
avec laquelle les médias du monde entier se sont précipités
pour diffuser
l’infâme calomnie contre l’auteur du Livre
du rire et de l’oubli prouve
que l’homo economicus qui règne
aujourd’hui n’est qu’un homo sovieticus déguisé – moins le rire,
toutefois.
À
propos, êtes-vous au courant du scandale Roth (Bruno Maillé) ?
u
Recule,
camarade, le nouveau monde est devant toi !
u
La
prophétie du jour : Seul le rire sauvera le monde – merci,
Jean-Jacques,
merci, Milan. Sinon en entier, au moins la partie qui rit.
L.
P.
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