| La distinction romans/poèmes,
ne permet pas d'éclairer l'évolution de Jouve, puisque
poèmes et romans sont écrits en parallèle et que
la « Vita nuova » débute en 1925 aussi bien avec
Paulina 1880 qu'avec Mystérieuses Noces. Dans la
succession des romans – pour nous en tenir à ce seul genre –
des lignes de fracture apparaissent. Ainsi à l'intérieur
du « dyptique » Aventure de Catherine
Crachat, une très forte distinction doit être faite
entre Hécate (qu'on peut donner à lire à
un lecteur débutant) et Vagadu (qu'il vaut mieux
réserver à des lecteurs avertis et consentants s'ils veulent en
percevoir le – très fort – intérêt). A
l'intérieur même du volume définitif La Scène
capitale (collectif de 1961)
et même à l'intérieur du volume initial La
Scène capitale (de 1935), on peut marquer une coupure. D'une part, nous regrouperons les Histoires sanglantes et la Victime qui
sont des nouvelles noires et assez ironiques et qui donnent l'impression
de sortir
directement de l'inconscient de Jouve (disons « assez
brutes de forme », bien qu'on a aussi l'impression que Jouve
joue avec les réactions du lecteur, grâce à sa grande maîtrise). Et nous mettrons
à part Dans les Années profondes, "court roman" ("novella", disent les anglo-saxons) où la plongée dans l'inconscient bénéficie
d'une écriture extrêmement soignée, récit
prodigieusement riche pouvant bénéficier de toutes
sortes de lectures : encore un chef d'oeuvre absolu de Jouve. Par conséquent, le
découpage des romans en trois blocs, déjà
envisagé : | - Paulina 1880 (1925) et Le Monde désert (1927)
- Aventure de Catherine Crachat (Hécate, 1927, et Vagadu, 1931)
- La Scène capitale (Histoires Sanglantes, 1932, et le diptyque La Victime et Dans les Années profondes, 1935)
| n'est pas opératoire. | Ensuite la séparation
entre poèmes et romans ne correspond pas au travail
d'écriture
et de publication de Jouve, car elle ne reconnaît
pas les liens très forts entre les romans et les
poèmes. Luc Pascal, l'un des
héros du Monde désert (1927), écrit des poèmes
qu'on retrouve dans les Noces (en particulier au début de La Symphonie à Dieu, 1930). Un poème de Pïerre Indemini (le héros d'Hécate, 1928) est repris dans Le Paradis perdu (1929). On croise Catherine Crachat et Hécate dans les poèmes de La Symphonie à Dieu (1930). Les poèmes d'Hélène (1936) sont adressés à la mémoire d'Hélène de Sannis, l'héroïne
de « Dans
les Années profondes » (1935). | Nous proposons une autre
distinction qui a l'avantage de respecter la chronologie des
publications de Jouve et de mettre en évidence ses évolutions
stylistiques. Elle permet aussi de mettre en évidence les
relations entre les romans et les poèmes. Elle a
l'inconvénient de ne pas respecter la forme des éditions
définitives voulues par Jouve à la fin de sa vie – il
commence ses rééditions en 1959, il a alors 72 ans – qui
sont celles qui sont rééditées dans les éditions
les plus accessibles (en poche) et une lecture approfondie nécessite
une reconstitution à l'aides des notes de l'édition de Œuvre en 1987. |
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